ÊTRE DANS LA PEAU X COMÉDIE-FRANÇAISE

Le Chien

Marcel Aymé - Les Contes du chat perché

Louis Braille vous parle et vous raconte son histoire

Les mains comme traductrices du monde

Je suis né en 1809. Je vois le monde mais me blesse accidentellement à l’âge de trois ans et je perds la vue. Je n’ai alors que peu de souvenirs de ma perception.

Chanter pour ressentir l’espace autour de moi me permet de me déplacer.

Mais ce n’est pas très discret, je dois l’avouer. Entendre les voix autour de nous sans pouvoir parfois nous représenter un visage reste abstrait.

Comment donner couleurs, formes et images à la beauté ?

Mes parents décident de m’inscrire dans une institution pour que je puisse apprendre et travailler. À l’époque, beaucoup d’aveugles, faute d’instruction, sont condamnés à mendier.

Comme la gravure inventée au XVIe siècle puis améliorée de supports en supports (bois, cuivre, pierre), nous apprenons avec l’aide de plaques de lettres en relief puis écrivons avec des matrices en creux. Un problème persiste toutefois. Il nous est impossible de relire ce que nous avons écrit, et les livres sont très lourds.

Notre mémoire se développe à vue d’œil (plutôt drôle non ?), nous devons apprendre par cœur à la fois les morceaux de musique étudiés et nos lectures.

Avec Gabriel, mon grand ami de l’école, nous réfléchissons aux systèmes d’écritures existants.

Celui de Valentin Haüy a ses limites. Et bien qu’elle représente une réelle avancée, la sonographie, invention du militaire Charles Barbier de La Serre pose problème aussi.

On représente les lettres et les sons par des points en reliefs excluant bon nombre de caractères.

Comment améliorer et surtout simplifier ce système ?

Nous souhaitons l’instruction au même titre que les autres.

À force de persévérance et de recherche durant 4 ans, je mets au point un système concret.

Avec 6 points en relief, j’arrive à obtenir 63 combinaisons possibles pour représenter les lettres et sans envahir l’espace !

Les avis divergent mais mon système rassemble pour mieux faire converger autrui vers la connaissance.

On creuse le papier, la lettre ressort pointée en relief de l’autre côté.

Comme en gravure, la seule gymnastique est de penser et former les lettres à l’envers lorsque nous les écrivons avec l’aide d’une réglette percée de petits trous et d’un poinçon.

Nous sommes en 1829 : le directeur de mon institution Monsieur Pignier, sort un premier livre qui s'appuie sur ma méthode, il croit en moi. Le braille est né, je l’apprends aux autres élèves. Mon système fonctionne également pour la musique.

1854 : à présent, le braille est adopté comme système officiel d’écriture pour malvoyants.

1950 : L’UNESCO (organisme international pour le développement de la culture) adapte le braille à toutes les langues de la planète.

1952 : je réside désormais au Panthéon aux côtés de grandes âmes qui ont contribué à l’Histoire et à l’amélioration de notre monde.

L’Association Valentin Haüy au service des aveugles et des malvoyants, créée en 1889 par Maurice de La Sizeranne et reconnue d’utilité publique en 1891.

« Nos deux corps se parlaient en braille, les yeux au bout des doigts, nous savions lire dans toutes les langues. » Le Dernier Hiver de Louise Auger (2012)

Merci à Hadrien – créateur de la typographie Braille Highlight – collaboration avec ars in cute, l’art dans la peau. Cette typographie relève du souhait de sensibiliser à l’écriture braille en créant une lecture double des deux alphabets. Nordsix / www.nordsix.ch.

LE CHIEN – MARCEL AYMÉ - LES CONTES DU CHAT PERCHÉ

Aurions-nous besoin d’un guide ?
Un guide de traversées, indiquant la bonne direction. Mais quelle direction ?
Aller vers la bonté, la générosité, l’empathie que nous savons ressentir face à autrui plutôt que l’abandon et la duperie ?

Est-il possible de prendre le mal, d’aider et de soigner l’autre, sans s'oublier en retour ?

Chien, chat, souris…
« On ne peut pas s’empêcher de regretter ses yeux » dit le Chien.

Mais, le voyage olfactif dont le Chien fait l'expérience avec la fraise de veau n'est-il pas aussi l'occasion de se découvrir et d'aller à la rencontre de l'autre ?

Le chien et le chat ne se quittent plus. Bien que différents, ils échangent aisément.

Le chat absorbe le handicap du chien puis c’est au tour de la souris de prêter main forte à l’équipe, en devenant aveugle.
Nous détournons-nous de celui qui perd la vue ou au contraire, lui accordons-nous plus de crédit ?
Le mal corporel se transmet-il comme une énergie passant de main en main ?

La question du pardon et des remords passés advient ensuite pour conclure le récit sur la notion de pitié et de fatalité.
Celui qui abandonne et usurpe la vie d’un autre est-il condamné à la fatalité de retourner vers sa condition d’origine ?

Entre personnifications animalières et métaphores multiples, ce conte extrait du recueil Les Contes du chat perché de Marcel Aymé est à la croisée des chemins de l’étude sociologique et de nos grands questionnements philosophiques sur la vie.